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« On ne peut penser le réchauffement climatique sans penser la question des inégalités sociales »

Points de vue 10 Avr.2018

Vous avez porté de nombreuses causes au cours de votre carrière. Quel moment de votre vie a été le plus formateur du point de vue de votre engagement ?

Audrey Pulvar Présidente de la Fondation pour la nature et l’hommeL’engagement, je suis tombée dedans quand j’étais petite. Je suis née en Martinique en 1972, dans une famille composée de personnalités marquantes. Mes grands-parents tenaient beaucoup à ce que leurs enfants aient un sort plus enviable que le leur. Pour cette raison, j’ai grandi avec l’idée qu’il faut s’élever à l’aide de ses propres ressources : l’instruction, la volonté, la droiture. Dans le contexte des mouvements d’émancipation des peuples et de décolonisation, mon père était très militant, tandis que ma mère a dédié toute sa vie aux autres au travers de son métier d’assistante sociale, et d’actes de générosité au quotidien. Cela a bercé mon enfance et m’a forgée, mais je n’ai pas été endoctrinée. Au contraire, mes parents ont beaucoup insisté pour que je forme mes propres opinions. Par la suite, mon père n’était pas du tout d’accord pour que je fasse des études de journalisme, mais je lui ai tenu tête !

Dans ma famille, tout le monde était très féministe, y compris les hommes. Là encore, cela me semblait naturel. Ce n’est que plus tard que j’ai compris qu’être une femme pouvait être un facteur invalidant dans la vie. Cela m’a menée à beaucoup m’exprimer depuis 25 ans sur les questions d’égalité hommes-femmes. Du fait de mon métier de journaliste, je n’ai pas milité, mais je me suis mobilisée et j’ai écrit, notamment sur la lutte contre les inégalités, les discriminations et la précarité.

Vous êtes depuis quelques mois la présidente de la Fondation pour la nature et l’homme. D’où vous vient votre conscience environnementaliste ? Quels sont les jalons qui vont ont menée à cette fonction ?

L’origine de ma conscience environnementale me vient d’un grand-père agriculteur. Quotidiennement, il y avait des épandages de pesticides dans les plantations de bananes des voisins. J’ai vu à l’échelle de ma jeunesse, sur une vingtaine d’années, disparaître des espèces animales, des insectes, des batraciens. C’est un souvenir fort qui m’est resté. D’un point de vue personnel, cette arrivée à la présidence de la Fondation pour la nature et l’homme répond à une forte volonté de me mettre au service de la communauté d’une autre façon que par mon métier de journaliste. J’ai été très choquée par les clivages qui se sont révélés aux dernières élections présidentielles, et j’y vois un lien profond avec la question des inégalités, et du dérèglement climatique. J’ai voulu assumer cette conviction en m’engageant davantage sur le plan professionnel. Cela n’était pas compatible avec mon activité de journaliste. Au départ de Nicolas Hulot, j’ai donc candidaté, et j’ai été élue.

Quelle vision de l’écologie défendez-vous ?

Ma vision de l’environnement est systémique. Je ne suis pas une scientifique et je n’ai pas la prétention de le devenir. Cependant, la Fondation la toujours eu une vision transversale des questions de fragilité des écosystèmes, qui entretiennent une relation avec le sentiment de déréliction et qui frappent de nombreuses populations. Cela favorise la propension de ces personnes à se tourner vers les extrêmes. Ainsi, on ne peut penser la question du réchauffement climatique sans penser la question des inégalités sociales. L’environnement n’est pas une question de « bobos » ou de nantis. Cela concerne d’abord des personnes qui se trouvent tout en bas de l’échelle, qui subissent de plein fouet les effets du réchauffement climatique. Ces mêmes populations sont celles qui ont le moins voix au chapitre, et n’ont accès à aucun pouvoir de décision. À l’échelle de la planète, les 10 % les plus riches produisent 50 % des gaz à effet de serre, tandis que les 10 % les plus pauvres subissent 50 % des effets du réchauffement climatique. En d’autres termes, les plus pollueurs sont également les plus résilients face aux dangers environnementaux, qui sont déjà une réalité très menaçante du quotidien pour les plus vulnérables.  

Comment envisager alors d’inverser la tendance ?

On espère que demain sera meilleur qu’aujourd’hui, c’est naturel ! À partir du moment où l’on prend conscience de l’urgence de la situation et qu’on met en œuvre la transformation, nous arriverons à rendre le phénomène supportable pour un plus grand nombre. D’ailleurs, le grand public est très demandeur de ces solutions, et à des échelles locales on voit que les gens commencent à s’organiser en groupes de pression pour obtenir le droit de ne pas être pollué par les produits des champs voisins, par exemple. Au point de vue global, il faut faire le constat que notre modèle de surconsommation nous conduit à notre perte. Plutôt que d’alimenter ce système, je propose qu’on ralentisse et qu’on se pose la question : que nous apportent tous ces produits achetés de façon compulsive, si ce n’est une satisfaction éphémère ? La consommation est comme un shoot de sucre, comme l’adrénaline d’écrire un tweet : cela ne remplit pas une vie.  Alors que tendre la main, aider et être aidé, lire, partager la beauté d’un tableau, d’un morceau de musique, voilà ce qui crée du lien et une satisfaction profonde. Je prône une croissance différente, et non pas la décroissance, car je ne crois pas au mythe de l’écologie punitive. Simplement, nous avons les moyens de nourrir correctement l’ensemble des habitants de la planète, à condition que ceux qui ont déjà beaucoup acceptent de s’ouvrir davantage aux autres richesses que sont la relation à l’autre, au vivant et au spirituel. Ce que je propose avec la Fondation pour la nature et l’homme, c’est l’idée d’une société qui grandit différemment, au service du plus grand nombre, dans le souci d’une santé publique mieux assurée, et de modes de vie plus respectueux de nos biorythmes. Il s’agit de remettre en ordre nos priorités, et de s’ouvrir à la possibilité d’une vie plus douce.

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