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Acteurs d’intérêt général, ce sont eux qui nous « tiennent ensemble »

27 mai 2017

Dans une société qui voit ses modes de vie, ses rapports sociaux, se transformer en profondeur, les acteurs privés d’intérêt général jouent un rôle essentiel : ce sont eux qui, au quotidien, inventent dans leurs pratiques les solutions de ce qui nous « tient ensemble ». 

Alain Mergier est sémiologue et sociologue. Il est également directeur du cabinet d'étude Wei.L’histoire de la notion d’intérêt général est liée à la relation entre l’État et la société civile, qui se transforme et évolue selon des étapes que nous pouvons schématiser à grands traits.

Au départ, dans la forge de la Révolution française, l’État souverain jacobin imposait sa définition de l’intérêt général et les modalités de son application. On était alors dans une logique purement verticale, descendante.

Dans une deuxième étape, l’État que l'on a qualifié de protecteur, agit en modelant la société française. Les acteurs de la société civile apparaissent, mais l’État continue à détenir le monopole de l’intérêt général, et la relation reste verticale.

Enfin, aujourd’hui, l’État se définit essentiellement dans un rôle de régulateur : il cherche à créer les conditions les plus favorables à la mise en œuvre d'un intérêt général qu'il circonscrit (au travers de l'outil fiscal) plus qu'il n'en donne une définition substantielle. La voie est plus largement ouverte à l'engagement des acteurs de la société civile dans l’intérêt général.

À travers ces étapes la relation entre État et société civile se stratifie à l'image de la réalité institutionnelle de ce pays complexe qu'est la France : le jacobinisme persiste dans l'État régulateur. Cependant une dynamique se dessine dans cette histoire. Face à la logique déductive de l'État jacobin qui part de la définition d'une généralité (l’État décide de ce qu'est l'intérêt général et impose à la société civile les modalités de sa mise en œuvre), se déploie une logique inductive. Partant des réalités du terrain, les acteurs de la société civile engagés dans l'intérêt général remanient sa substance, adaptent ses contours aux évolutions continues de la société. La logique haut/bas se double de son inverse qui va de bas en haut.

Cette dynamique se traduit par une transformation du rapport à l'intérêt général. Rappelons-le : l'intérêt général, c'est ce qui nous « tient ensemble ». D'un point de vue grammatical, c'est ce qui permet à chacun de pouvoir dire « nous » pour renforcer le « je » dans les épreuves du réel. L'histoire récente nous montre à quel point est vulnérable ce qui tient notre société en tant qu'ensemble. Il ne faut voir dans cette vulnérabilité ni faillite ni épuisement. Bien au contraire.

Cette vulnérabilité de ce qui nous tient ensemble résulte de la dynamique de notre société, de sa capacité à transformer ses modes de vie, ses process de production, ses rapports sociaux. Les changements qui animent la société doivent s'accompagner du développement de sa capacité à « s'adapter à elle-même », à se réajuster en permanence à ce qu’elle devient, à suivre son propre mouvement en ayant le souci de se maintenir ensemble.

Les associations, les fondations, l'économie sociale et solidaire, incarnent cette capacité de notre société à être attentive à elle-même. Que font ces acteurs ? Ils agissent en partant des situations de tous les jours, en s'inscrivant dans des réalités concrètes, dans ce qui est vécu par des personnes de chair et de sang. Ils n'appliquent pas des directives venues d'en haut, ils inventent dans leurs pratiques de terrain les solutions de ce qui nous maintient ensemble. Leur reconnaître leur capacité d'action est une chose, mais cela est insuffisant. Il conviendrait de les reconnaître aussi comme détenteurs d'une connaissance issue de la confrontation aux épreuves que la société s'impose à elle-même. Ces acteurs de l'intérêt général sont des acteurs majeurs de la réflexivité sociale. Ils détiennent des ressources de savoirs que l'État devrait apprendre à écouter : logique de bas en haut, disions-nous.

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