Fondations pour l’éducation : un panorama inédit
Par Anne Bouvier,
responsable du programme Éducation de la Fondation de France et rapporteur de l’étude au Conseil économique, social et environnemental.
Avec 500 fonds et fondations engagés en faveur de l’éducation des enfants et des jeunes, ce secteur représente près d’un quart de la philanthropie française. Pour en savoir plus sur les motivations des fondateurs et leurs priorités d'actions, le Centre français des fonds et fondations, en collaboration avec le Centre d’étude et de recherche sur la philanthropie, a réalisé en 2015 un état des lieux[1]. Quelques enseignements de ce panorama.
Véritable enjeu de notre société, l'éducation est le domaine choisi par de nombreux fondateurs et notamment des particuliers. Pour 88 % d'entre eux, l’égalité des chances est le moteur de leurs actions. Viennent ensuite la volonté de renforcer le lien social, ainsi que le développement de l’enfant. Ces ambitions se traduisent par des actions menées principalement dans les écoles ou via des associations, en faveur de la réussite scolaire pour tous. Ces actions ont pour objectif l’acquisition des savoirs fondamentaux et la lutte contre le décrochage scolaire, d'autres se concentrent sur l’épanouissement de l’enfant, qui peut impliquer un accompagnement à caractère social : plus d’un tiers des fondations agissent directement auprès des familles, pour les accompagner dans leur rôle éducatif.
La recherche et l’innovation dans le domaine pédagogique font également partie du champ d’action des fondations. Formation, accompagnement des enseignants dans la production et l’appropriation d’outils innovants, diffusion des bonnes pratiques…. sont des initiatives soutenues par 40 % des fondations du secteur.
En marge des enseignements fondamentaux, le développement de certaines disciplines éducatives suscitent l’intérêt de 33 % des fondations interrogées : si l’éducation artistique et culturelle est la plus plébiscitée, notons que l’éducation citoyenne et à l’environnement sont des champs de plus en plus investis par la philanthropie.
Un soutien plus développé pour les collégiens
Bien que les études de l’OCDE montrent la nécessité d’un accompagnement des enfants dès le plus jeune âge, les fonds et fondations n’interviennent en très grande majorité qu’à partir du collège et des premiers signes de décrochage – avec souvent un suivi jusqu’à l’âge adulte –, pour une action plus curative que préventive. Le soutien des fondations croît avec l’âge des enfants, et peu s’intéressent aux enfants de primaire et encore moins de maternelle.
Toujours selon l’échantillon étudié, les enfants bénéficiant de ces initiatives vivent principalement en milieu urbain. On constate une très forte disparité territoriale : l’Ile-de-France, Midi-Pyrénées et Rhône-Alpes sont les régions qui bénéficient le plus de la générosité des fondations pour l’éducation, alors que le Nord Pas-de-Calais, pourtant jugé prioritaire et bénéficiant d’un réseau philanthropique développé, est délaissé. Enfin, 74 % des fondations agissent à l’échelle locale ou régionale, mais seules 8 % se consacrent exclusivement aux territoires ruraux.
Le désintérêt pour les petits et cette forte inégalité territoriale constituent deux points de réflexion majeurs qui seront explorés par les commanditaires de l’étude.
Sélectionner et évaluer les actions menées
Les projets engagés ou soutenus par les fondations pour l’éducation durent généralement entre six mois et trois ans. Avant d’agir, les fondateurs sont particulièrement attentifs au milieu social des enfants bénéficiaires, à leur âge ainsi qu’au lieu où se situe le projet (les quartiers prioritaires étant privilégiés).
Ces actions font la plupart du temps l’objet d’une évaluation afin d’en mesurer l’impact, même si le recours à des évaluateurs professionnels reste marginal. L’une des difficultés rencontrées concerne le passage de l’expérimentation à une diffusion large des bonnes pratiques.
Le cercle des fondations dédiées à l’éducation, dont cette cartographie est la première initiative, devrait permettre à ces fondations de travailler davantage ensemble, voire de mutualiser leurs moyens. La question de l’évaluation de l’action sera l’un des chantiers prioritaires.
[1] Étude réalisée à partir d’une enquête en ligne menée de mars à mai 2015, complétée par un questionnaire en ligne adressé aux répondants en septembre 2015. Sur la population-cible de 500 fonds et fondations identifiés, 192 ont répondu au questionnaire, au moins en partie.
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