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Tisser des liens solidaires : une nécessaire réciprocité

Points de vue 13 Juil.2018

Serge Paugam revient ici sur le besoin de liens inhérent à tout individu, mais aussi sur la nature de ces liens qui, pour être libérateurs, doivent être réciproques.

Serge Paugam est sociologue, directeur de recherche au CNRS et directeur d’études à l’EHESSL'individu ne peut vivre sans attaches et passe sa vie à s'attacher – ou à se rattacher après une rupture – à sa famille tout d'abord, mais aussi à ses proches qu'il choisit par amour ou amitié, à sa communauté ethnique ou religieuse, à ses collègues de travail ou à ses pairs, aux personnes qui partagent les mêmes origines géographiques, sociales, culturelles ou nationales, mais aussi aux hommes et aux femmes qui souffrent et auprès de qui il souhaite s’engager. Autrement dit, l’être humain est anthropologiquement solidaire car il ne peut vivre sans ces attachements multiples qui lui assurent à la fois la protection face aux aléas du quotidien et la reconnaissance de son identité et de son existence en tant qu'être humain. Mais comment et jusqu'où peut-on et doit-on être à la fois solidaire de sa famille, solidaire de ses divers groupes d'appartenance affinitaire, solidaire de son entreprise ou de son groupe professionnel, solidaire de sa nation et, de façon encore plus large, des hommes et des femmes quelle que soit leur appartenance, c’est-à-dire solidaire de l’humanité tout entière ?

Un besoin de protection et de reconnaissance

Un constat s'impose immédiatement : cette question se pose à chaque être humain et correspond en cela à une interrogation de nature universelle. Les liens solidaires sont multiples et de nature différente, mais ils apportent tous aux individus à la fois la protection et la reconnaissance nécessaires à leur existence sociale. La protection renvoie à l’ensemble des supports que l’individu peut mobiliser face aux aléas de la vie (ressources familiales, communautaires, professionnelles, sociales…), la reconnaissance renvoie à l’interaction sociale qui stimule l’individu en lui fournissant la preuve de son existence et de sa valorisation par le regard de l’autre ou des autres. L’expression « compter sur » résume assez bien ce que l’individu peut espérer de sa relation aux autres et aux institutions en termes de protection, tandis que l’expression « compter pour » exprime l’attente, tout aussi vitale, de reconnaissance*.

Dans le prolongement de cette définition préalable, quatre grands types de liens sociaux peuvent être distingués : le lien de filiation (entre parents et enfants), le lien de participation élective (entre conjoints, amis, proches choisis, acteurs associatifs), le lien de participation organique (entre acteurs du monde professionnel) et le lien de citoyenneté (entre membres d'une même communauté politique). Ces liens sont vitaux. Les individus, ainsi attachés, peuvent se sentir libres puisque les liens qui les attachent entre eux leur procure la force vitale de leur intégration à la société. C’est pourquoi, lorsque ces liens sont fragiles et risquent de se rompre, ils affectent profondément les individus et menace la société tout entière. Ils peuvent aussi perdurer tout en n'apportant pas entièrement ce qu'en attendent les individus. Dans ce cas, ils ne libèrent pas, mais fragilisent et oppressent.

Des liens fondés sur l’interdépendance et la réciprocité

Comment tisser des liens solidaires qui libèrent vraiment les individus et garantissent la cohésion sociale ? Cela implique tout d’abord de concevoir ces différents types de liens sous l’angle de l'interdépendance et de la réciprocité. Ces liens doivent donc être fondés sur l'échange de protection et de reconnaissance. Mais alors, cela nous interroge sur la façon d’aider nos proches ou les personnes dont on pressent le besoin. Trop souvent l’aide que nous souhaitons apporter aux individus en souffrance ne remplit pas cette condition élémentaire et risque par conséquent de stigmatiser ou d’oppresser celles et ceux qui en bénéficient, de les conforter dans le sentiment qu’ils sont déjà disqualifiés. Trop souvent l’aide reste unilatérale et a pour objectif de soulager davantage celui qui la donne que celui qui la reçoit. Trop souvent la relation d’aide vise uniquement à suppléer les carences matérielles ou fonctionnelles des personnes à qui elle s’adresse et se passe d’une écoute attentive et bienveillante. Face à ces dérives possibles, il faut rappeler que les liens solidaires sont avant tout des liens qui conduisent non pas à faire à la place des personnes en difficulté passagère ou permanente, mais à faire avec elles dans une relation conçue d’emblée comme une interdépendance, comme une marque de notre appartenance commune à un groupe déterminé, mais aussi, dans sa version la plus universelle, comme la marque de notre attachement à l’humanité toute entière.


*Voir sur ce point Serge Paugam, Le lien social, Paris, PUF « Que sais-je ? », 4e édition mise à jour à paraître en août 2018.

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